LA FRANCE LES REGARDE
Marseille et le Paris-Saint-Germain disputent ce soir une finale de Coupe de France qui redonne du lustre à cette épreuve et offrira à l'un des deux rivaux une fin de saison réussie. Si certains supporters ne gâchent pas la fête.
Effacer le passé ?
Marseille - Paris-SG en finale de la Coupe de France, c'est un peu Brésil - Allemagne en finale de la Coupe du monde. Une affaire de spécialistes qui auront réussi, par miracle, à s'esquiver tout au long du XXe siècle sur leur terrain de jeu favori, mais que l'histoire a fini par rattraper. Et à un moment spécial. En 2002, le Brésil et l'Allemagne sortaient de quatre saisons tristes au moment de leur premier face à face mondial. En 2006, Marseille et le Paris-Saint-Germain se retrouvent pour donner un sens à leur saison, pour la première fois en finale, exactement 55 jours après avoir touché le fond dans l'orageuse relation qu'ils entretiennent depuis le début des années 1990. C'est l'affiche la plus attirante du football français, car les deux clubs sont passionnels et restent les deux seuls de l'Hexagone à avoir remporté une Coupe d'Europe. Mais c'est aussi une affiche qui ne tient jamais ses promesses. Il y a au mieux de beaux gestes (Ronaldinho et Pauleta sont passés par là, Boli aussi à une autre époque), souvent une certaine intensité et des dénouements de dernière minute, mais rarement l'ivresse d'un vrai sommet et des souvenirs pour la vie. Une grande finale peut effacer tout ça.
Trop loin de Lyon, une fois de plus, pour jouer le rôle qui doit être le leur en L1, Marseille et le Paris-SG ont beaucoup plus à gagner qu'à perdre ce soir. L'un d'eux sera le troisième club à valider un billet européen ce printemps (Lyon est en C1, Nancy en C3). Ils offriront un grand soir à leurs publics, souvent privés d'émotions fortes. Et cette finale garnira une vitrine à trophées beaucoup trop pauvre sur la période récente pour les deux clubs. Le Paris-SG n'a remporté qu'un titre depuis la fin de l'ère Denisot en 1998 et c'était justement la Coupe de France en 2004. De son côté, Marseille attend un titre majeur (hors L2 et Coupe Intertoto) depuis sa Ligue des champions 1993. Un succès serait une forme d'encouragement pour Robert Louis-Dreyfus et ses investissements à fonds perdus.
Une finale à haut risques
La guerre psychologique qui a précédé la finale fut réduite à sa plus simple expression. La présence de dizaines de milliers de supporters de chaque camp dans un espace difficile à quadriller entraîne des risques considérables. Chacun les a mesurés dès la fin des demi-finales. Le ministère de l'Intérieur et les médias ont constaté et encouragé une spectaculaire réconciliation entre les présidents Blayau et Diouf, solidaires à l'heure d'appeler au calme et de défendre leur cas devant le CNOSF. Seul geste d'intimidation, le Paris-SG, à tous les étages du club, a quand même cherché à faire passer le message que Marseille était le favori objectif de la finale, au motif qu'il a gagné quelques matches récemment et qu'il occupe une meilleure place en L1 (5e contre 8e). La ficelle est grosse. Les quatre points qui séparent les deux équipes sont ceux que l'OM a pris contre Paris cette saison (1-0, 0-0), menée des deux côtés à un rythme très irrégulier. Le PSG sait mieux que personne que toutes les valeurs se nivellent dans une finale. Il a dominé deux gros bras lors de ses deux premières victoires (Saint-Etienne et Nantes en 1982 et 1983) et a laissé échapper la Coupe de la Ligue contre un club de L2, Gueugnon, en 2000.
Il est cependant recevable que Marseille - qui découvrira le Stade de France - ressente en ce moment une pression plus importante, liée à la sécheresse de son palmarès récent et à son glorieux passé dans la compétition : avec dix titres, l'OM détient le record absolu et a un rang à tenir. Sa dernière victoire remonte à 1989 et la dernière finale à 1991. Epris de jeu et éternels insatisfaits, les deux entraîneurs Jean Fernandez et Guy Lacombe sauront trouver les mots pour que les joueurs, par ailleurs irréprochables ces derniers jours, ne se trompent pas de combat. La Coupe occupe une place à part dans l'itinéraire de Fernandez, qui l'a gagnée en 1976 en tant que joueur marseillais. Et Guy Lacombe est venu deux fois au Stade de France, dont une, en 2004, pour gagner la Coupe de la Ligue avec Sochaux. Ils savent que tout se jouera sur un détail et connaissent leur chance de pouvoir aligner leur meilleure équipe en un jour si important. Deux quatuors offensifs aux armes différentes tenteront d'enivrer Saint-Denis vingt jours avant Barcelone - Arsenal : Kalou - Dhorasoo - Rothen - Pauleta d'un côté, Ribéry - Niang - Maoulida - Pagis de l'autre. Pauleta et Ribéry sont les joueurs sans lesquels le PSG et l'OM ne peuvent atteindre leur meilleur rendement. Le match leur appartient en partie. En 2002, Ronaldo avait fini le travail pour le Brésil. Tous les regards seront braqués sur ces huit là au soir de la vingt-cinquième finale impliquant l'un des deux clubs.