NADAL, UN, DOS , TRESRafael Nadal rejoint Björn Borg en remportant son troisième titre d'affilée à Roland-Garros. Après avoir survolé la quinzaine, l'Espagnol n'a pas tremblé (6-3, 4-6, 6-3, 6-4) pour dominer le numéro 1 mondial, Roger Federer, devenu bien humain face à la puissance adverse. Le numéro 2 mondial reste invaincu Porte d'Auteuil !
Le coup droit de Rafael Nadal a encore fait des ravages cette année.
Comment rendre Roger Federer«normal» ? Seul
Rafael Nadal ossède la solution. Comment expliquer une balle de break convertie par le Suisse en 17 tentatives ? Seul Rafael Nadal possède la solution. Le public du court Central, acquis à la cause du numéro 1 mondial, a bien essayé d'y croire. Peut-être plus que son héros. Certains peuvent évoquer un complexe
«Nadal», d'autres souligner la loi du plus fort. Est-ce la force de l'habitude de voir le jeu si fluide du Suisse se déliter sous le lift de l'Espagnol à Paris ? Une forme de résignation semble s'abattre sur le Suisse. Il veut gagner Porte d'Auteuil, mais il n'y arrive pas. Comble de l'offense pour ce génie du jeu. Bien sûr, Roger Federer a battu Rafael Nadal lors de leur dernière confrontation sur terre à Hambourg, mais dimanche à Roland-Garros, c'est autre chose. Et ce premier set aux multiples occasions ratées peut hanter ses prochaines nuits. Pourtant il se veut philosophe : «
Il faut regarder l'adversaire. Il est remarquable, très dur à jouer, notamment lors des moments importants. Je n'ai pas pu concrétiser mes balles de break au premier set, cela m'a amoindri tout au long du match.» Dans une méga-production hollywoodienne, le triple vainqueur des Internationaux de France pourrait revêtir le costume du nettoyeur. Il balaie les lignes, inflige des droite-gauche comme des gifles à son adversaire, ne baisse jamais les armes et concrétise chaque occasion.
Le premier set devient un modèle de la suprématie mentale de l'Espagnol sur le Suisse. Le Majorquin a beau clamer qu'il est outsider, c'est lui le patron sur terre. A partir de 1-2, le numéro 1 mondial laisse échapper des balles de break sur chaque jeu de service. A 2-3, le bras de fer dure un quart d'heure, le temps de voir s'évanouir cinq nouvelles occasions. Une incongruité pour le roi du
money-time ! Et la sentence est immédiate, Rafael Nadal profite de la frustration adverse et de la panne de service de la tête de série n°1 (38% au premier set) pour breaker (4-3) sur un jeu blanc grâce à quatre fautes directes. Toute la différence entre les deux joueurs se lit dans le jeu suivant. Le Suisse mène 0/40 et l'Espagnol enchaîne sept points consécutifs pour gagner son engagement et filer vers le set sur un coup droit gagnant décroisé, son arme absolue. Deux occasions, deux breaks... Et une impression qu'il peut rester des heures sur le court : «
Je savais que si le match durait, j'aurais un léger avantage. C'était important de gagner le premier set car là on se dit qu'il en reste deux autres à remporter et l'autre se dit : "encore trois !"» Simple comme son jeu.
Nadal de plus en plus fortEn champion, Roger Federer tente de changer la donne au deuxième set. Il suit plus souvent ses services au filet, tient mieux le choc en revers et surtout n'hésite plus à lâcher ses coups droits en décalage pour réussir le break, mener 4-3 et conclure (6-4) en s'appuyant sur son service retrouvé. Rafael Nadal semble aussi perturbé qu'un
bobby face à un parterre de touristes devant Buckingham Palace. Stoïque, il riposte pour s'échapper 2-0 dans le troisième set sur un passing de revers décroisé incontrôlable. La
grinta n'est même pas de sortie. L'Espagnol maîtrise et part gagner la troisième manche (6-3). Tout simplement. «
Je n'ai pas pu poser mon jeu comme je le voulais, avoue le Suisse
. J'essayais de diriger le match avec mon coup droit, mais je n'étais pas en réussite dans ce secteur. Tout le mérite lui en revient.»
Pour la suite, l'homme de Manacor démontre qu'il n'est pas seulement puissant. Depuis un an, il a progressé en revers et en service. «
Je joue mieux cette année que l'an dernier, concède le champion.
Je sens mieux le jeu et je peux être plus agressif en coup droit et aussi en revers.» Au moindre danger, il est capable de réussir un revers gagnant et son service de gaucher met au supplice le Suisse. Quand le dernier break arrive à 2-1, tout paraît tellement normal. Le numéro 1 mondial baisse la tête, son rival n'en rajoute pas. Il n'a pas besoin d'intox, il a déjà gagné le combat physique et mental. «
C'était un match très physique. Il vous fait rater beaucoup de balles, explique le vaincu.
Avec Rafael qui est gaucher, c'est plus difficile. Mon plan de jeu vole en éclats.» Rafael Nadal conclut sur un jeu blanc et une 29e faute de coup droit de Roger Federer clôt les débats. Il peut tomber à la renverse après 3h10' de combat. Si le Suisse ne touche plus terre sur toutes les autres surfaces, l'Espagnol se roule sur cette terre parisienne avec délectation. Par la tribune présidentielle, il grimpe remercier son clan. Puis d'une voix timide, il procède aux traditionnels remerciements avec le trophée des Mousquetaires dans les bras, remis par Gustavo Kuerten.
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